L’Amour avec un grand A

Tu cherches l’Amour avec un grand A.

Je le cherche aussi. Je l’ai croisé déjà. Silhouette fugitive, trop vite entrevue et disparue l’instant d’après. Peut-être même qu’il ne faut pas dire qu’on le cherche, de crainte qu’il ne s’enfuie. Jamais on ne se l’approprie. Il est là, c’est tout. Miraculeux ou simplement absent.

Je le voudrais un peu perdu, avec de grands yeux confiants, inconditionnel. Je l’aimerai imparfait, comme il est. Je sais qu’il faudra être attentif, extrêmement, à tout moment, pour savoir lui sourire. L’occasion tient en une fraction infinitésimale de notre temps, un clignement de paupière, un battement d’ailes. La pensée est trop lente pour le reconnaître, ça n’est que dans un élan de tout son être qu’on peut le suivre.

On le croisera encore, c’est sûr. Ce sera peut-être demain matin dans le bus de sept heures, celui qu’on prend chaque jour, ou dans celui de sept heures douze parce que pour une fois on sera en retard. Peut-être habitera-t-il notre rue, notre immeuble, ou peut-être encore nous demandera-t-il de le suivre à l’instant, dans son délire, dans sa cavale. Et nous, bien sûr, on le suivra.

J’ignore ce qu’il nous coûtera, peut-être rien, peut-être la vie. Mais je sais qu’il sera douloureux, au moins un peu. Sinon ce ne serait pas lui.

Et je sais que lorsqu’il sera là, le grain de nos vies, la densité de l’instant augmenteront. On le touchera, on le sentira avec intensité, de tout notre être. Et des choses simples, un café en ville, le craquement du cuir d’un blouson, occuperont alors tout l’espace.

Voilà pour l’Amour avec un grand A, celui des cimes. Et pardonne-moi si pour moi, tout le reste, la maison, les enfants, le chien, le crissement des pneus sur le gravier de l’allée, c’est du roman. Pardonne-moi d’être aussi catégorique, le grand A ne m’appartient pas plus qu’à toi, pardonne-moi ce délire d’un dimanche après-midi pluvieux, pour une fois que j’ai le temps.

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