Tu t’es occupée de tous; mais qui y a-t- il pour prendre soin de toi?

Dans leurs vaisseaux spatiaux, les héros d’Asimov n’allaient ni aussi vite, ni aussi loin que je n’ai été projeté ces jours derniers. Ce fut une plongée abyssale et vertigineuse où j’ai presque perdu le souffle, un voyage entre deux univers sans interactions, à peine entrevus. Et qui pourtant, l’un et l’autre, m’ont empli de tristesse.

Dans l’un, qui est celui d’une richesse sans mesure, il y a tant de matière et si peu d’êtreté que je crois bien que les individus eux-mêmes se jugent, s’estiment en termes vénaux, à l’aune de l’intérêt. Tout y brille : les chromes des limousines, les cuivres des Palaces, les objets de marque. Les femmes y sont belles, très, le champagne sublime, et dans ses casinos, il se perd chaque soir des sommes déraisonnables. Si aujourd’hui vous êtes riche, vous y serez adulé, et si demain vous avez tout perdu, alors vous ne serez plus rien.

Dans l’autre, qui est celui de l’infortune, on le nomme quart-monde, vous n’êtes
déjà plus rien. Cette nuit vous avez couché à l’abri ; la nuit prochaine vous ne savez pas. Vos heures hébétées s’écoulent au fond d’un square. L’usure du froid, des repas incertains, du manque d’espoir et de l’alcool ont tant et tant ralenti le fil de vos pensées que vous ne parvenez presque plus à
communiquer. Et puis dans vos hardes, parfois, vous effrayez les passants.

Etrangement, ce choc des Mondes m’a propulsé vers le haut. D’abord, il m’a fait apprécier au centuple les loyautés dont je suis l’objet, l’estime de ceux là même que j’estime, la permanence du chez-moi, du chez-nous devrais-je dire, qui m’accueille à chacun de mes retours. Ensuite, il m’a fait apprécier, aimer voudrais-je dire en un sens non-exclusif, chacun de mes interlocuteurs, chacun de leurs héroïsmes, chacune de leurs générosités, tout ce qui les rends humains. Vous m’avez ouvert vos portes autant que vous pouviez, vous m’avez donné tout ce que vous aviez, et parfois plus encore, alors que rien ne vous y obligeait. Quand parfois même tout aurait dû vous retenir.

Alors merci pour : Ces quelques gestes qui ne mentaient pas, une cigarette en bas du Casino. La soupe au pain, et cette pièce de théâtre que nous ne sommes jamais allés voir ; c’était tellement mieux ainsi. L’accueil dans la maison entre les vignes, et notre complicité plus encore que jadis je ne l’aurais imaginée. La confiance accordée au-delà de tout ce qu’un jour j’aurais osé espérer. Et puis la plus émouvante des nouvelles de la semaine, un heureux événement à venir. Et puis encore vos mille complicités, vos mille clins d’œil, vos mille rire, qui tous ensemble ont fait que je me suis senti aimé.

Tu t’es occupée de tous; mais qui y a-t- il pour prendre soin de toi ?

2 réflexions au sujet de “Tu t’es occupée de tous; mais qui y a-t- il pour prendre soin de toi?”

  1. Un clin d’oeil de passage, un sourire à la lecture de ce texte plein de sincérité et de gentillesse, et de la joie pour l’heureuse nouvelle.
    Amitiés.

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