La poussière du chemin

Tu m’as paru si loin, tu étais si proche. Comme si la poussière du chemin s’était collée à toi, comme si la nuit avait été d’insomnie, comme un peu transparente.

Tu t’affairais de l’autre côté des arbres, à j’ignore quoi, mais avec ce sérieux juste un peu trop sérieux, qui est le tiens quand tu t’affaires. J’entendais par vagues, un bruit, ta voix, plus rien, ta voix à nouveau, sans savoir les mots, sans vouloir les comprendre, un peu éloignée, suffisamment près, pour que j’aie envie de continuer à aplanir le chemin, l’esprit serein. Peut-être qu’à l’instant c’était la bonne distance, entre nos mondes de ce jour-là, suffisamment grande pour qu’on ne se sente pas contraints, assez courte pour que je ne doute pas que tu existes.

Comme tu allais et venais, que je piochais la terre, tu m’as fait une réflexion quant à mon ardeur au travail, depuis ton bout de l’allée, qui du coup m’a semblé un peu moins longue, mais sans t’avancer trop. Toi ici, moi là-bas. Je me suis appliqué, à aplanir le sol. Un peu pour faire bien, un peu pour te dire ma présence, un peu pour ceux qui ont des difficultés à négocier la montée quand il pleut et qui font partie de toi.

Comme tu passais à nouveau, tu m’as dit encore quelque mots, je me suis rapproché pour n’avoir pas à parler trop fort, et pour te rappeler cette petite phrase d’un autre temps qui m’a tiré à toi, alors que notre distance était bien plus grande encore. Cette petite phrase qui, dans ma bouche cette fois-ci, m’a paru soudain nous débarrasser de la poussière, d’une part de ce qui te pesait, et raviver les couleurs au gré d’un rayon de soleil, bien réel.

On est revenus à nos extrémités, un peu de temps s’est écoulé, je ratissais. Puis tu t’es arrêtée à ma hauteur. «Je continue !» m’as-tu dit. Quelques mots encore, nos sourires, nos iris dans la lumière, il s’était passé quelque chose, de tout petit et de magique, de joyeux qui… Mais non, pas les mots, ils trahissent.

Nos sourires, oui !

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