As-tu senti la petite secousse de l’aiguillage?

C’était une matinée comme ça, sans y penser, sans rien attendre, surtout pas ta rencontre. Quand j’ai relevé la tête, tu étais là, tes yeux très verts plongés dans les miens.

Tu as eu ces quelques mots, timides, fragiles, un peu hésitants. Un mouvement pour te rapprocher, une main tout près de moi. Il y avait tes grands cils, les traits réguliers de ton visage, ta silhouette gracieuse dans la lumière. Cette manière de te mouvoir. Tu m’as dit ton prénom que j’ai instantanément oublié, ton regard tellement dans le mien que j’en tremblais.

Je suis allé m’asseoir dans un bureau vide. Dehors il y avait du soleil, du bleu dans le ciel, de la fraîcheur dans le jour nouveau. Je me suis senti étrangement léger, subjugué, presque frissonnant. Puis j’ai trouvé un prétexte pour venir te retrouver à ta place.

Tes yeux de nouveau, qui ne quittaient plus les miens, si intensément que ça en devenait presque indécent, avec dans l’air quelque chose de magnétique, de physique. Un attrait. Ton parfum. Un émerveillement naissant à se regarder, à se sourire, à se regarder à nouveau. On s’est dit un peu n’importe quoi, juste pour entendre le son de nos voix. Surtout, on s’est dit qu’on s’enverrait un courriel, que la prochaine fois on irait manger ensemble, que c’était bientôt. Je suis reparti avec de toi plein la tête, plein les sens, troublé, ébloui.

Et puis, et puis, le long de la route qui me ramenait à la gare je t’ai laissée comme un joli rêve qui s’évanouit au réveil. On se souvient un peu, mais très vite tout disparaît. Parce que quoique je veuille, mon âme n’est pas ici, un peu perdue, restée en arrière, dans un autre songe. Tellement plus lumineux.

Je ne t’écrirai pas.

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