Ce serait une vie sans dimanches, une existence privée de lendemains. Elle marcherait sur des trottoirs où tout lui parlerait de lui, mais d’où il serait absent. Elle verrait des immeubles qu’il a regardés, mais il ne serait pas là. Des autos passeraient en l’éclaboussant.
Tout, en fait l’éclabousserait, une remarque acide de la concierge, un passant qui la bousculerait, peut-être même un sourire qui le lui rappellerait. Elle s’étonnerait de parvenir encore à exister sans lui. Et puis les jours passeraient, comme une campagne triste qu’on traverserait. Elle mettrait un peu plus de noir sur ses cils et elle sortirait avec n’importe qui dans des endroits où la musique est trop forte, où les lumières sont trop vives. Elle rentrerait tôt le matin, avec dans la bouche un arrière-goût amer. Elle regarderait tomber la pluie en se demandant pourquoi elle vit et où elle va. Elle irait de petites échéances toujours reportées en petits espoirs souvent déçus. Elle serait comme une pièce sans tableaux, un lieu de passage auquel on ne voudrait accrocher aucun souvenir, et elle appellerait cela exister !
Dans quelques heures, ce sera l’aube. Elle déteste l’aube, comme si elle était porteuse d’espoirs trompeurs, comme si le soleil n’avait pas le droit de se lever, comme si le monde devait porter son deuil. (A suivre…)