Ta voix dans le brouhaha.

Centième billet.

Par-dessus la cime dégarnie des arbres, plein Est, j’aperçois le drapeau à croix blanche déployé dans le Vent, et plus loin encore, la silhouette incertaine, massive et grise des Alpes qui barrent l’accès au Sud. Quelques flocons tournoient à hauteur de mes fenêtres, paraissant devoir ne jamais atteindre le sol. Suivis par d’autres, de plus en plus nombreux, qui me ramènent aux jours de mars, qu’ils sont loin, d’avant mon printemps romain. Quand dans mon carnet j’écrivais :

« (…) Puis on m’a appelé. Je suis allé au centre-ville. Et d’un coup, une succession de sentiments, de couleurs, de regards m’a assailli. J’ai eu l’impression d’un carnaval bigarré, et les flocons étaient comme des confettis. »

Neuf mois et demi séparent ces flocons-ci de ceux-là. Deux-cent quatre-vingt-huit jours à découvrir encore que la vie est un domaine toujours plus vaste qu’on ne l’imagine. A faire des rencontres dont je n’ai pas fini de revenir. A vivre des événements parfois exceptionnels, tout en tâchant de ne pas perdre de vue l’importance centrale des acteurs qui les animaient. A découvrir des êtres qui, pour peu qu’on leur prête attention, méritent tous le qualificatif de merveilleux. Ou plutôt celui de profondément aimables, au sens premier du terme. A échanger des milliers de mots et presque autant d’idées dans des dialogues à chaque fois édifiants, en ce qu’ils m’ont permis de grandir, et, je l’espère, d’apporter quelque chose à mes interlocuteurs. A m’enthousiasmer, à caresser, à aimer, à pleurer…

Neuf mois et demi d’une trajectoire elliptique dont j’ai le sentiment qu’elle me ramène à mon point de départ. Alors, à l’heure du brunch, j’ai demandé à Cédric, le solide et fidèle soutien de chaque épisode, s’il était possible que tout finisse là. Que cette vie ne soit plus qu’un long ruban droit et sans surprises, jusqu’à son terme. Que le printemps ne revienne pas.

Un moment il s’est tu, souriant dans le brouhaha de la grande salle où chacun tentait de se faire entendre. Et puis il m’a dit : « Non, il y a tant de monde qui a tant de choses à dire ! »

Quand tu déboucheras du coin de la rue, alors je ne verrai plus que toi.

2 réflexions au sujet de “Ta voix dans le brouhaha.”

    • Tu n’as pas tort… Etrange destin qui me rappelle dès le surlendemain que tout peut arriver à tout moment, le meilleur aussi. D’une manière telle que j’en viens parfois à douter qu’il s’agisse du hasard. Merci pour ta fidélité.

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